La grande loterie des tarifs bancaires

Le Monde Logo 700Les banques en ligne ne pouvaient pas rêver mieux. En décidant d’augmenter leurs tarifs en 2016, les réseaux bancaires traditionnels n’ont pas seulement créé une ­polémique, ils ont également renforcé un peu plus l’avantage compétitif de leurs concurrents du Net. Les acteurs 100 % Web n’ont-ils pas fait de la gratuité des principaux services (carte bancaire, accès ­Internet, virements, etc.) leur ­marque de fabrique  ?

L’étude annuelle des tarifs bancaires réalisée par Choisir-ma-banque.com pour Le Monde, qui analyse pour six ­profils types les prix de 134 établissements, est sans appel. «  En moyenne, nos six clients règlent 41  euros dans les banques en ligne, contre 166  euros dans les réseaux bancaires, soit un rapport de 1 à 4 pour des prestations identiques  !  », calcule ainsi le fondateur de Choisir-ma-banque.com, Ludovic Herschlikovitz. ­Soucieux de permettre au consom­mateur de s’y retrouver dans la jungle des prix, le ministère des finances a d’ailleurs lancé le 1er février un comparateur public des onze tarifs de base. Cet outil confirmera le grand écart entre les banques Web et les autres.

Sélectivité

Cette année encore, les banques Internet trustent donc les premières places de nos classements. Du moins pour les particuliers qui peuvent y prétendre. Car il faut pouvoir justifier d’un minimum de revenu pour être éligible à leurs services (1  600 euros net par mois par exemple chez BforBank) ou pour obtenir une carte bancaire gratuite (1  000 euros net par mois pour une carte standard chez Boursorama). Cette sélectivité explique que notre profil jeune actif (pour lequel nous avons fixé un revenu de 1  100  euros) n’ait accès qu’à certaines banques en ligne.

Les établissements traditionnels, eux, restent à la traîne. Désormais, 82 % des banques de notre panel font payer des frais de tenue de compte (16,42  euros par an en moyenne), contre 43 % seulement en 2013. BNP Paribas (30 euros) et la ­Société générale (24  euros) ont ainsi rejoint, depuis le 1er janvier, la longue liste des banques les facturant. Précisons que, dans la très grande majorité des cas, la facturation de ces frais n’est appliquée qu’en dehors des packages, ces offres groupées de produits et services.

Parmi les autres hausses, notons celle de l’assurance moyens de paiement, dont le prix continue de grimper (+ 1,29 %, à 27,70 euros) alors que son utilité est plus que discutable, ou celle des cartes standard à débit immédiat (+ 2,05 %, à 38,72  euros).

Frais de tenue de compte

«  Ces dernières années, les pouvoirs ­publics se sont attaqués à des lignes de frais bancaires en plafonnant, par exemple, les commissions d’intervention prélevées en cas de découvert non autorisé. Les banques ont trouvé un moyen, avec les frais de tenue de compte, de se rattraper  », décrypte M. Herschlikovitz. L’existence de ces frais est justifiée selon Baudoin Choppin de Janvry, directeur conseil ­industrie financière secteur ­banque de ­détail chez Deloitte  : «  Le modèle des banques en ligne a pu laisser penser que les services bancaires étaient gratuits. Mais, en réalité, c’est une fausse idée, il n’y a aucune raison à cela. Il n’est pas anormal de régler quelques euros par mois à sa banque, c’est largement inférieur à ce que l’on débourse pour un accès Internet/téléphone.  » Pas sûr que les ­consommateurs l’entendent de cette oreille.

Si les banques de réseau sont sensiblement plus chères, leurs tarifs sont par ailleurs très hétérogènes. Ainsi, notre profil «  employé  » (1  600  euros de revenu mensuel net) règle 176,48  euros en moyenne au Crédit mutuel, soit 40 % de plus que le réseau le moins cher (124,99 euros au Crédit agricole). Idem pour notre profil «  cadre supérieur  » (3  500  euros de revenu mensuel net), avec une différence de 20 % entre l’établissement le plus coûteux (BNP Paribas) et le moins cher (Crédit agricole). Point important  : nous avons effectué des moyennes ­nationales pour ceux qui sont mutualistes (Banque ­populaire, Caisse d’épargne, Crédit agricole et Crédit mutuel), mais dans ces réseaux, chaque région fixe ­librement sa politique tarifaire, ce qui conduit à des différences significatives.

La suite de l’article : La grande loterie des tarifs bancaires
Le Monde – Argent et Placements – 2/02/2016

 

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